Une année charnière pour le climat

January 15, 2007
Op-ed
Published in La Presse (Jan. 15, 2007)

Quelle année pour tous ceux qui sont préoccupés par le changement climatique! En 2006, le réchauffement planétaire a été propulsé au premier plan dans nos débats politiques, dans les médias et dans l'esprit des citoyens canadiens. En 2007, la tendance risque de s'intensifier, au Canada et ailleurs au monde, jusqu'à en faire une véritable année charnière pour le climat.

De prime abord, la marée de conclusions alarmantes provenant des milieux de recherche continue de monter. En 2006, l'ancien économiste en chef de la Banque mondiale, Nicholas Stern, a pondu un méga-rapport démontrant l'ampleur les coûts associés aux bouleversements climatiques et l'urgence de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) pour des raisons purement financières. En 2007 ce sera au tour du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), dont le mandat est de conseiller les gouvernements du monde entier, de rendre public son évaluation quinquennal de l'état des connaissances scientifiques dans le domaine. On peut s'attendre à ce que ce rapport exhaustif, qui sera dévoilé à Paris début février, établisse plus solidement que jamais l'influence humaine sur le climat et l'urgence de réduire les GES.

L'Année polaire
L'année 2007 verra aussi le plus important effort de recherches scientifiques dans l'Arctique depuis 50 ans, avec l'Année polaire internationale qui débutera en mars. Cela nous ramènera beaucoup de nouvelles sur les transformations profondes en cours là où les impacts du changement climatique se manifestent le plus rapidement.

En attendant, le phénomène El Niño nous promet une continuation des conditions météorologiques qui nourissent les inquiétudes des citoyens. Déjà, 2006 était l'année la deuxième plus chaude jamais observée au Canada. Le Meterological Office britannique calcule une probabilité de 60% que l'année 2007 sera mondialement la plus chaude jamais enregistrée, grâce à la combinaison d'El Niño et le réchauffement dû aux activités humaines.

Aux Communes
En 2006 le changement climatique a pris une place sans précédent dans les débats à la Chambre des communes, qui a voté à deux reprises en faveur du protocole du Kyoto. En 2007 le projet de loi C-288 du député Pablo Rodriguez loi qui exigerait que le gouvernement fédéral se conforme au protocole reviendra pour un dernier vote aussi tôt qu'en février. Un comité spécial procédera en même temps à une révision en profondeur du projet de «loi sur la qualité de l'air» du gouvernement Harper.

Tout cela pourrait, bien sûr, être intérrompu par une élection fédérale où, pour la première fois, le changement climatique risque de figurer au coeur des débats. Stéphane Dion, premier prétendant au poste de Stephen Harper, a présidé avec enthousiasme les négotiations des Nations-unies sur le climat en 2005 et affirme que «l'enjeu principal du siècle, celui dont tous les autres dépendent, est l'interaction entre l'environnement et l'économie».

Du côté des Américains
Le réchauffement planétaire pourrait également prendre beaucoup plus de place en 2007 dans la politique fédérale aux États-Unis, où les démocrates ont pris le pouvoir au Congrès. En novembre dernier, les nouveaux présidents des comités du Sénat responsables de l'environnement et l'énergie ont adressé une lettre à George W. Bush dans laquelle ils s'engagaient à «oeuvrer à l'adoption d'un système efficace d'objectifs de GES obligatoires» pendant la séance qui vient de débuter.

2007 vera enfin d'intenses pourparlers internationaux concernant la réduction des GES après 2012, date d'expiration des premiers objectifs du protocole de Kyoto. En décembre, à la conférence des Nations unies sur le climat à Bali en Indonésie, les pays subiront de très fortes pressions pour se doter d'un véritable mandat de négociation pour une deuxième phase du protocole. Une fois lancées, il faudra probablement deux ans pour conclure ces négociations, et ensuite un temps considérable pour ratifier le nouvel accord. Il y a donc urgence pour lancer le processus.

Paradoxalement, en minimisant l'importance du changement climatique et en dédaignant le protocole de Kyoto, Stephen Harper a probablement grandement contribué au reveil de l'opinion publique en 2006, jusqu'au point où l'environnement est devenu la première préoccupation des électeurs. M. Harper affirme que l'environnement est désormais une priorité pour son gouvernement. En cette année charnière pour le climat, à lui de nous présenter un plan fédéral complet, ambitieux et convaincant pour le protéger.